LETTRE
DE DUBOIS THAINVILLE
A
TALLEYRAND
DU 6 VENTOSE AN XI
[25 FEVRIER 1803]
SUR L'ARRIVEE D'UNE DIVISION NAVALE FRANCAISE
DEVANT ALGER
N° 137
6 ventôse an XI [25 février 1803]
Citoyen Ministre,
La division de nos forces navales, composée des frégates la Cornélie, le Rhin et du lougre le Renard, aux ordres du capitaine Gourdon, a paru devant Alger le 4 de ce mois [23 février]. Je me suis à bord le 5 [24 février]. Votre lettre du 7 pluviôse [27 janvier] m’a été remise. Ce matin j’ai vu le Dey. Je lui ai annoncé, sans ménagement, ainsi que vous me l’ordonnez, les intentions du Premier Consul. Il m’a d’abord signifié de sortir de ses états. Après de longs débats, il a fini par déclarer qu’il était le meilleur ami des français ; qu’il me priait de rester auprès de lui, et qu’il s’en rapportait entièrement à moi pour terminer irrévocablement avec mon gouvernement de la manière qui me paraitrait la plus convenable. Au moment où l’audience avait lieu, la division louvoyait assez près d’Alger : tout le pays était en alarme, parce qu’on avait publié qu’elle était suivie de forces considérables. J’ai envoyé à bord le citoyen Ragueneau, mon secrétaire, pour annoncer les dispositions pacifiques de la Régence. La division a mouillé en rade ; elle a été de suite saluée par 21 coups de canon. Le commandant Gourdon s’est rendu à terre ; il y a été accueilli par des démonstrations extraordinaires d’amitié. Il restera ici quelques jours. Le lougre le Renard pour calmer les inquiétudes de nos navigateurs. Je vous écris à la hâte. Je vous rendrai demain le compte détaillé de mes négociations.
Agréez, etc…
Dubois Thainville.