LETTRE
DU PRINCE DE TALLEYRAND
AU
DUC DE BROGLIE
MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES
EN DATE DU
6 MAI 1833
N° 106
Londres, le 6 mai 1833
Monsieur le duc,
M. le duc d’Orléans est arrivé avant-hier à dix heures du soir, après avoir fait une bonne traversée et un heureux voyage.
J’ai reçu la dépêche N° 53 que vous avez bien voulu m’écrire le 2 de ce mois ; celle que j’ai eu l’honneur de vous adresser le 3 sous le N° 105, se trouve répondre aux observations que vous faites sur l’affaire belge. Je sens comme vous la nécessité de terminer cette affaire ; mais il existe ici des exigences qui en rendent pour le moment la prompte solution assez difficile.
Il me semble que l’argument qui se trouve employé dans le dernier paragraphe de votre dépêche ne paraitra pas sans réplique car il faut bien remarquer que la première expédition de Belgique et la convention du 22 octobre ont été des actes, qui par cela même qu’ils fortifiaient le ministère français ont contribué à affaiblir le ministère anglais, ce qui fait qu’il n’y a pas parité dans les deux situations. La mesure de l’embargo a déplu beaucoup en Angleterre, et la discussion à laquelle elle donnera lieu jeudi ou vendredi prochain à la chambre des Communes ne laissera pas que de produire une fâcheuse impression dans l’opinion publique.
Comme je vous l’indiquais dans ma dernière dépêche, les dépêches de Berlin affermissent encore le cabinet anglais dans la résolution d’attendre le résultat des démarches des trois Cours à La Haye, et la réponse du gouvernement des Pays-Bas à notre note du 22 avril ; cette réponse, d’après les lettres de M. d’Eyragues ne se ferait plus attendre longtemps.
Je viens de recevoir les dépêches que vous m’avez fait l’honneur de m’écrire sous les N° 54 et 55 ; je me réserve d’y répondre demain.
Agréez, Monsieur le duc, l’assurance de ma haute considération.
Ch. Mau. TALLEYRAND.
MAE - ARCHIVES DE NANTES - AMBASSADE DE LONDRES - SERIE K - CARTON 13